[Guilde ASX] Equipe T-42.

Nom : ASX
Concept : Recherches Scientifiques de Terrain - Services et soins
Serveur : Triton [PvE-Jdr FR]
Localisation : Parcelles Protostar - Thayd - Celestion
Forum de Guilde :  Par ici.
Recrutement : Ouvert
Personnes à contacter : Lucius / Orioch




Histoire :


Voilà sept ans que Lucius Emerson fait des pieds et des mains pour obtenir son affectation sur Nexus auprès de ses supérieurs à l'ASX. Enfin autorisé à poser le pied sur la planète, il a tout de même reçu comme instruction de monter une équipe afin de mener ses recherches sur la faune et la flore... Et de faire profiter les Exilés des nombreux talents de ses collaborateurs.
Suivi sur place par Orioch Yänsson et Eva Shelley, collaborateurs désignés par l'ASX, les trois scientifiques ont déjà mis en place, dans l'attente de la réception de l'équipement adapté à des fouilles de terrain, un dispensaire ouvert à tous les Exilés.
Ils envisagent d'ores et déjà de se rendre à Celestion, si l'ASX ne décide pas de leur donner un ordre contraire.



Concept :


L'aventure ASX a débuté côté Dominion avec les Laboratoires Invictus. Séduits par le lore dont nous voulions connaître toutes les facettes, ainsi que par l'activité des rôlistes qui prédominent côté Exilés, il a été décidé entre les membres de monter la guilde finale dans cette faction.
Comme du côté du Dominion, le concept est simple : réunir une équipe performante afin de mener des recherches poussées sur la faune et la flore de Nexus afin de tirer profit de leurs propriétés diverses - et nombreuses - tout en assurant la survie de ceux qui tentent de la coloniser.
Si nous avons l'intention de jouer partout sur la planète, les terrains protostar des membres accueillent tout de même un laboratoire, et un dispensaire.


Les personnages fondateurs :

Diplômés depuis de nombreuses années, habitués aux expéditions inter-planétaires et aux recherches de terrain, le noyau de l'équipe a été envoyé tel quel sur Nexus avec pour mission de s'entourer convenablement afin de remplir leurs objectifs et ceux de l'Académie. Que ce soit à cause de leur caractère, de leurs aptitudes naturelles ou de l'utilité de leurs compétences sur un vaisseau comme le Quitte ou Double, ils ont été envoyés sur Nexus tardivement.  L'équipe semble malgré tout relativement équilibrée.

Lucius Emerson : Caractériel et emporté, Lucius se considère comme le maître incontesté de l'équipe. Si ses collaborateurs lui reconnaissent volontiers cette place, c'est parce qu'ils sont d'un caractère plus réservé et lui reconnaissent un talent sans pareil pour se faire entendre et obtenir ce qu'il veut de la hiérarchie - en leur criant dessus suffisamment longtemps et en ne lâchant jamais le morceau jusqu'à avoir obtenu gain de cause.

Orioch Yänsson : Aussi calme et taquin que son colocataire est caractériel et emporté. Est l'ingénieur indispensable au bon fonctionnement du matériel et donc de l'équipe. Pendant bordélique des autres fondateurs il est le roc qui affrontera les tempêtes ( qu'il aura sans doute déclenché en laissant traîner ses chaussettes) du Docteur Emerson. Aussi adepte des mauvais jeux de mots que des jolies dames.

Eva Shelley : La seule femme de l'équipe fondatrice. Elegante et raffinée, la femme entre deux âges est une esper accomplie et parfois quelque peu inquiétante. Elle n'a pas son pareil dans le domaine de la psychologie, et dispose d'ores et déjà d'un cabinet où accueillir les patients réguliers qui la consultaient sur le vaisseau qui l'a amenée jusqu'à Nexus. D'un calme froid, son rôle dans l'équipe, en plus d'offrir un support médical et psychologique consiste généralement à refroidir les ardeurs de Lucius.




Notre fonctionnement :


Notre but est avant tout d'offrir un RP construit, consistant et durable. Particulièrement attirés par le lore du jeu et l'aspect de découverte qu'il offre, et la possibilité de rencontrer des ennemis sur le terrain, la guilde a pour but, comme les laboratoires Invictus montés auparavant côté Dominion, de se déplacer et de s'ouvrir à toutes les interactions RP possibles en pleine nature.

. Les expéditions :

L'ensemble du jeu de la guilde tournera autour des expéditions sur Nexus. Chaque expédition se fera en trois étapes : La préparation, l'expédition, le debriefing / détente. Au fil du quotidien de la guilde, il y aura toujours une étape en cours de jeu, avec son lot de tâches quotidiennes imposées à accomplir, et de jeu en commun.

Préparation : Etape ouverte par un briefing général où un objectif sera fixé en commun avec l'ensemble des membres de la guilde, et une destination prévue afin de permettre la résolution de cet objectif. Le Maître de Jeu de la guilde (la joueuse d'Eva Shelley) se réserve d'avance le droit d'imposer des demandes par l'ASX afin de créer des scénarios.

Expédition : Le moment où la guilde passera le plus de temps sur le terrain. Les déplacements étant facilités dans ce type d'univers, il ne sera pas obligatoire de rester au campement, mais fortement recommandé pour l'immersion de participer aux RP quotidien qui y seront joués. Tout rôliste souhaitant se joindre l'espace de quelques jours à l'expédition sera naturellement le bienvenu, tant qu'il ne trouble pas les recherches.
Pour permettre un environnement véritablement immersif, certains campements d'expédition seront montés sur une parcelle protostar afin d'offrir un visuel cohérent en adéquation avec l'idée que les joueurs en ont.

Debriefing / détente : Le retour à la civilisation sera l'occasion de célébrer la réussite - ou l'échec - d'un projet et de se reposer quelques jours. Les maisons des fondateurs seront accessibles à tout moment aux membres de l'équipe, et des soirées de détente seront proposées.


. Le résultat des expéditions :

En cas d'expédition réussie, les résultats seront utilisés afin de créer de la publicité autour d'un produit nouveau, proposés à d'autres guildes et autres. De manière générale, du jeu sera créé autour autant que possible, afin de rendre l'objectif des missions plus intéressant qu'un simple événement qui passe et qu'on oublie. Le nom de la personne qui aura joué le rôle le plus important dans l'accomplissement de l'objectif sera naturellement associé à sa réussite.
Nous pensons qu'il n'existe pas de RP intéressant sans sentiment d'accomplissement personnel. La guilde a été pensée dans ce but, et nous ferons de notre mieux afin de créer pour les joueurs l'impression de s'inscrire dans un cadre réaliste, immersif, et satisfaisant.

. Le dispensaire :

Le RP de service étant une constante pour les fondateurs, Eva a mis en place un dispensaire afin de permettre aux personnes blessées de se faire soigner par des personnages joués. Les consultations seront dispensées sur sa parcelle Protostar ou sur celle de Lucius. En dehors des soins d'urgence sollicités par les rôlistes, Eva Shelley est qualifiée dans les domaines de la psychologie et de la psychiatrie, et se fera une joie de recevoir les personnages traumatisés par la guerre.

. Les événements :

La guilde dispose d'un MJ dont le rôle sera uniquement de déterminer le cours des événements et d'imposer aux joueurs des obstacles destinés à permettre aux rôlistes de se surpasser, et aux personnages de se distinguer. Une trame sera toujours en cours, que les membres le réalisent ou non, et le maître de jeu travaillera en étroite collaboration avec Lucius Emerson (qui ne sera pas toujours au courant de ses projets) afin d'offrir une palette d'expériences aussi variées que possibles.

. Le RP quotidien :

Les fondateurs ont pour habitude de vivre leurs personnages en permanence, et ce même quand un événement n'est pas en cours. Vous pourrez les trouver dans des activités aussi banales et "inutiles" que boire un thé chez eux, arroser des plantes ou écrire un livre. Nous croyons fermement qu'il n'existe pas de bon ou de mauvais RP, et que faire uniquement de l'événementiel "qui bouge" n'a pas davantage d'intérêt que se limiter à du RP taverne permanent. Nous pratiquons un mélange de tous les RP. Ne vous attendez donc pas en nous rejoignant à sauter d'un événement à l'autre sans pause. L'ennui fait partie à nos yeux du vécu d'un personnage autant que ses cascades.



Les profils recherchés :


Nos trois personnages sont des scientifiques consommés et reconnus au sein de l'alliance des Exilés, chacun expert dans son domaine de prédilection, mais nous ne nous attendons pas à recruter des scientifiques uniquement. Une expédition digne de ce nom demande bien plus que des scientifiques : combattants, infirmiers, intendants, guides, mécaniciens, palefrenier pour équivar ... Il est probable que chacun puisse y trouver sa place, définitivement ou ponctuellement.

Si la guilde vous intéresse mais que vous ignorez la manière d'y entrer ou que vous jouez un personnage potentiellement incapable de s'entendre avec un caractère comme celui de Lucius Emerson, votre personnage pourrait être imposé à l'équipe de base par un organisme extérieur officiel (FCON, ASX), et ce, que l'irrascible Lucius le veuille ou non.

Il nous semble également important de développer les relations entre les personnages, que ce soit dans le cadre d'événements comme dans le cadre d'un RP plus posé. Une présence régulière est donc souhaitable autant pour vous que pour nous.



Informations diverses :


Le projet est subventionné par l'ASX et les différentes factions armées : ces dernières fournissent les fonds nécessaires aux soins effectués sur leurs membres. Evidemment, les dépenses les plus grosses et les soins particuliers telles que les commandes d'implants spéciaux sont à la charge des demandeurs, dans la mesure où nos personnages ne sont pas assez riches pour vous offrir tout ce dont vous pourriez rêver.

Si une guilde désire s'associer avec notre petite nous nous ferons une joie de discuter de cela et de nous mettre à votre disposition en cas de besoin, ou d'acheter les fournitures que vous pourriez vendre.

Pour ce qui est de la hiérarchie interne de la guilde, vous aurez droit à un chef plutôt exigeant et pas toujours des plus aimables. Heureusement, Orioch et Eva seront théoriquement là pour calmer ses ardeurs.

L'un des projets à long terme de la guilde, et qui me tient particulièrement à coeur, est de rédiger un compendium rassemblant les informations sur la faune et la flore de Nexus. Les informations que l'on peut trouver grâce aux vocations, dans les archives galactiques et le folklore, mais également celles que nous pourrons observer en RP et en PVE. Si vous souhaitez y participer, il est conseillé d'apprécier la rédaction en semi-RP puisque le but est à terme d'en faire un ouvrage et de le publier ici pour que tout le monde y ait accès. Il sera également illustré par les joueurs (merci à Anamedée et Plumb de leur sympathique collaboration de ce côté-là) et leurs personnages.

Le dispensaire sera ouvert et mis à votre disposition si vous souhaitez y jouer une convalescence, et vous pourrez contacter Eva pour obtenir un rendez-vous lorsque vous aurez besoin de soigner votre esprit, ou l'un des deux hommes pour quelque chose de plus tangible.

Nous remercions également la charmante Anamedée pour le design du forum.

La première tasse était un mug. Il trônait dans le placard monté de guingois, ainsi que tout placard de garçonnière mal achalandée se devait d'être monté. Plus large que les autres, il dominait également par sa hauteur, qui lui permettait d'afficher sur ses flancs immenses une magnifique pin-up montée sur un broyeur. Il reflétait sans peine son propriétaire. On le devinait rieur, sympathique, ouvert et un peu graveleux. Doué de ses mains également, puisqu'il ne faisait aucun doute à voir le reste des croquis qui traînaient dans l'appartement que le docteur Orioch Yänsson lui-même était à l'origine de l’œuvre qui ornait son récipient favori.

La seconde était de porcelaine délicate. Légèrement ébréchée, elle avait sans nul doute appartenu à tout un service dont les pareilles avaient rendu l'âme au terme de nombreux voyages et déménagements impromptus. La jolie soucoupe blanche qui la soutenait était ornée des mêmes roses peintes aux couleurs passées qui agrémentaient la tasse, et rappelaient la nostalgie d'une époque où les ancêtres de sa propriétaire pouvaient se permettre des fantaisies coûteuses et fragiles, heureux sédentaires qu'ils étaient. On la devinait rescapée, soigneusement et régulièrement sauvée.

La troisième, incongrue, représentait des canetons. De joyeux petits canetons jaunes qui se suivaient à la queue leu-leu tout autour du bord, marchant en file indienne de la gauche vers la droite. Certains avaient autour du cou d'adorables petits nœuds bleus, et aucun n'était représenté tout à fait pareil que les autres. Ils avaient une âme, ces petits canetons. Certains se lorgnaient, la tête haute, d'autres suivaient sagement, filant le bec bas pour rattraper les autres. Et lorsqu'on la regardait on était pris tout à coup d'un doute affreux. Parce que si le mug à la pin-up appartenait sans conteste au galant de l'équipe, et que la délicate porcelaine cassienne ne pouvait aller qu'entre les mains blanches aux longs doigts fins et nerveux du docteur Eva Shelley, alors on réalisait que cette tasse là ne pouvait appartenir qu'au professeur Lucius Emerson, qui n'était connu ni pour être joyeux, ni pour être incongru.

D'autres sans doute auraient fui devant l'aberration et le choc mental qui en résulte. Mais peut-être pas l'insensé justement venu là ajouter la sienne.

D'autres vinrent s'ajouter plus tard, la première à le faire fut celle de Rosaline "Libelungun" Irwin, dont le mug était posé près du mug à la pin-up dans le placard monté de guingois. La tasse de Rosaline est une timbale en métal toute aussi grande que sa voisine. Ecaillée, elle laisse apparaître le noir du métal oxydé sur ses arrêtes et les bords de la hanse. La peinture est d'un rose clair délavé et de gros cœurs blancs bien dodus, visiblement rajoutés à la main, en ornent le pourtour d'une manière chaotique. On imagine aisément la frèle rousse tenir précieusement sa tasse fumante de café dans ses mains, contre son giron, pour se réchauffer près des feux de camp lors des expéditions de l'équipe T42.

Les fameuses tasses, par l'artiste Plomb. Merci à elle pour ses œuvres toujours merveilleusement inspirantes.

« Certains sont de structure basique, mais Leeb a déjà avancé ses recherches autant qu'il était possible de le faire de ce côté.»

La voix éternellement bourrue d'Emerson roulait sourdement comme le grondement d'un fauve. L'homme était proprement incapable de murmurer, et alors même qu'il tentait d'étouffer le son de sa voix pour ne pas éveiller Yänsson qui dormait encore à cette heure matutinale, le grommellement continu remontait en vibrant le long des tôles d'acier qui composaient la maison. Il reprit dans sa barbe.

« La lecture des autres composés sera complexe. Ils ont même emprunté un système codé pour créer le septième...Allez-vous cesser de vous agiter ainsi ? Vous commencez à me donner des...des idées.»

La femme, qui ne se redressa malgré l'avertissement qu'au terme de sa troisième série de cinquantes pompes ne portait qu'une chemise. Une chemise appartenant à Emerson, pour être exact, largement trop grande et également largement ouverte. Sous le grognement désapprobateur de Lucius, Eva referma trois boutons de la rangée, ramenant dans sa mise un semblant de convenance, et vint prendre entre les doigts dociles du professeur Emerson, l'infochron sur lequel il était en train de déchiffrer les dossiers rapportés de la visite au laboratoire de Wilfried Leeb.

« Où en est la construction du nouveau laboratoire ?
- Les autorités sont débordées et les autorisations de l'ASX ont tardé. Les travaux ne vont commencer que prochainement.
- Quand.
- Prochainement, Emerson. Vous savez à quel point cette inexactitude me hérisse autant que vous.
- Pourquoi ne m'en avez-vous pas averti ?
- Parce que vous seriez allé déverser votre colère sur le pauvre bougre qui aurait perdu à la courte paille pour vous ralentir pendant que son supérieur et le reste de ses collègues tentaient de prendre la fuite par la fenêtre de derrière en fabriquant une corde de leurs blouses nouées.
- Vous exagérez, Shelley, tout le monde sait que je suis d'une remarquable égalité d'humeur. D'ailleurs ce malentendu ridicule a été dissipé. »

Lucius récupéra son infochron et se leva à la suite d'Eva.

« Vous avez été évasive, Shelley. Que faisiez-vous chez Leeb, et quel rapport avec le tueur du FAAV ? »

Eva fouillait dans le placard. Dans SON placard. Il vint refermer la porte du plat de la main, afin d'avoir la certitude d'obtenir son attention. Il arrivait à la jeune femme de se perdre un instant sur la contemplation d'un détail, et de réaliser plus tard qu'on lui avait parlé. Elle semblait avoir parfaitement entendu, cette fois là, et ne repartait pas sans butin. Sur trois chemises, il en avait une noire, et celle là reposait sagement sur le bras fin d'Eva en attendant d'être dépliée. Avec l'air d'un martyr résigné, Emerson jeta un regard nostalgique à sa chemise, puis revint à la femme, attendant sa réponse. Elle se détourna en direction de la porte avant de la lui donner par dessus son épaule.

« Jarek disait s'y trouver.
- Comment savait-il y trouver ces virus ?
- Je l'ignore.
- Comment connaît-il Leeb ?
- Je l'ignore.
- A-t-il les connaissances nécessaires pour utiliser ce qu'il a trouvé dans le laboratoire de Leeb ?
- Je l'ign...»


Le bras massif d'Emerson avait heurté la paroi d'acier dans un bruit sourd, tout près de l'oreille de Shelley. Il pencha sur elle ses épaules de géant, et vint enfouir son nez dans les boucles noires mal ordonnées de la jeune femme. Elle sentait la sueur, le frais des draps retournés par une nuit de sommeil agitée, et le savon au vetiver dont toute l'équipe usait dans la salle de bain commune. Il aimait ces moments où elle sentait encore la femme, avant de s'être maniaquement récurée des pieds à la tête, ne laissant trace sur sa peau d'aucun autre parfum que la fragrance ambrée et discrète qui insultait la finesse de son odorat de chasseur, et dont il ne désespérait pas encore de lui faire abandonner l'usage.

« Je veux, souffla-t-il, que vous cessiez d'aller seule en vadrouille sans prévenir personne de votre position. »

Eva retint une réponse cinglante, et s'abstint finalement, les lèvres serrées. Elle finit par demander d'une voix calme :
« Est-ce tout ?
- Oui. »

Il la libéra de son bras avant qu'elle ne s'avise de le faire seule, et l'observa continuer de tourner dans la chambre à la recherche de nouveaux vêtements.

« Lorsque le nouveau laboratoire sera prêt, allez-vous venir y travailler ? »

Emerson détourna le regard vers les murs de tôle épais et familiers, la porte déglinguée qui coulissait mal et dont il était le seul à connaître le truc pour qu'elle se débloque, les coussins élimés qui jonchaient le sol et qui l'avaient suivi de longues années durant au gré de ses affectations. Le terrain alloué à sa vie privée était devenu en l'espace de quelques semaines le territoire de l'ensemble de l'équipe, et s'était moulé autour de lui comme une coquille se forme naturellement autour d'un snorglug. L'en déloger revenait à vouloir déloger un girrok de son antre en période d'hibernation. Pour le sortir de là, il faudrait sans nulle doute employer une pique à escargot.
De mauvaise grâce, il grommela :

« Peut-être. »

Aussi vive qu'un serpent, Olympe dégaina, et son bras frôla celui de l'homme qui s'était glissé derrière elle, esquissant le même geste. Trois secondes, ils se regardèrent, et d'un commun accord, rengainèrent en soulevant le rabat de leurs holsters.
Parnasse plaqua sa femme contre le bureau, et fit taire ses protestations de la manière la plus efficace qu'il connaissait. Au bout d'un moment, elle cessa de se débattre, et lorsqu'il lui permit enfin de respirer, ne resta étourdie qu'un instant par la fougue envahissante avec laquelle il l'avait embrassée. Sobrement il dit "Je me suis inquiété."

Olympe se retourna, sans commenter et recommença à fouiller dans le bureau. Elle avait déjà sorti trois dossiers d'intérêt. Elle était plus émue qu'elle n'avait l'intention de le montrer. Se livrer de la sorte n'était pas dans les habitudes de son tendre époux, qui préférait exprimer son attachement conjugal par des attentions aussi ravageuses qu'épuisantes, et une constante rivalité professionnelle. La réelle émotion que sa longue absence avait suscitée chez lui devait être poignante. La main posée sur son épaule il la força à se retourner vers lui. Ses yeux avaient l'éclat sombre d'un orage. Il gronda sourdement aiguillonné par un regain de possessivité.
"Etes-vous entrée en contact avec lui ?
- Oui."

Il attendit. Elle ajouta, avec une lueur de défi dans le regard. "Il est charmant."

"Nom de...
- Langage, Parnasse."

Il serra les dents, et murmura tout bas, un ronronnement doux qui présageait ses colères les plus violentes.
"J'arracherai volontiers les tripes de tout homme ou femme que vous pourriez trouver "charmant", Dolenta, mais cela attendra que je vous aie replantée dans mon jardin. Je jure que vous finirez par me forcer à v..."

Il ne termina pas sa phrase. Les narines évasées, le nez froncé comme un fauve qui vient de flairer une proie, Parnasse releva la tête, et les cheveux courts de sa nuque qui n'étaient pas emprisonnés dans une queue de cheval se hérissèrent. Olympe suivit son regard en direction de la porte. Auréolée par la lumière du couloir, Eva les contemplait.

Elle mit moins d'une seconde pour dominer sa surprise, mais son réflexe vint tard, bien trop tard. D'un geste commun exécuté parfaitement en miroir, Parnasse et Olympe avaient dégainé, et tiré. La première balle - elle ignorait de quelle arme elle provenait - ricocha sur le bouclier que son esprit avait instinctivement déployé. La seconde le transperça en sifflant, creusant dans sa carapace mentale un trou de néant pour la frapper de plein fouet, les mains levées à mi-course d'un sort.

Parnasse jurait abondamment, sans davantage se soucier d'être entendu. Au terme d'une analyse froide et minutieuse Eva constata avec le plus grand intérêt qu'elle ne sentait rien, pas même la douleur. Par l'étroite fente de ses yeux mi-clos, elle contempla paresseusement les bottes qui passaient devant son visage en empruntant la sortie. Elle se sentait agréablement tiède, cotonneuse, et rien, pas même cet instant, n'aurait pu altérer la félicité de ce jour : Elle était la femme d'Emerson.

Alors que le goût âcre du sang s'imposait à sa langue et poissait sa joue pressée contre le plancher d'acier, elle sourit aux anges et murmura son nom.

A l'attention de l'équipe présente sur le site 14-A. L'équipe T-42 vous rejoindra Lundi. Motif de l'expédition : trouver la source d'alimentation de l'Annihilateur sur le site et rechercher des traces de vie quotidienne dans les ruines eldans.

Terry Argiess lut le mot en silence. Puis il passa une main sur son visage balafré, avant qu'un lent sourire étire ses lèvres. Il savait quoi faire. Sa jambe mécanique grinça légèrement, comme en signe d'approbation, et il fit demi-tour. Direction Potence.
Il rentra au camp quelques heures plus tard, alors que scientifiques, ouvriers et mercenaires étaient en train de prendre leur dîner.

-" Bon, les gars, on s'arrache. Demain, à la première heure, je veux que tout soit nickel. Le premier qui reste ici sera viré - et je vous assure que je peux me débrouiller pour que vous n'ayez plus de boulot. Compris ? Bien. Donc, demain, direction l'exosite N22. Allez ranger vos affaires. ET QUE ÇA SAUTE !"

Pour lui-même, il ajouta, avec un sourire goguenard :

-" En voilà, un beau cadeau de mariage."



~



-" Je suis navrée, professeur Emerson, mais il n'y a personne de disponible à Potence."
-" Non, personne, ils sont tous occupés."
-" A Thayd aussi. Vous allez devoir chercher ailleurs."
-" Oui, je vais m'occuper de faire passer une annonce."
-" Non, je ne crois pas qu'Argiess y soit pour quelque chose."
-" Non."
-" Je vous assure que non."
-" Cessez d'écrire en majuscules, professeur, c'est immature."
-" Bonne journée à vous également."

Ellie Jolly envoya un chewing-gum en l'air d'un geste du pouce et de l'index avant de refermer ses dents dessus. Assise au centre du demi-cercle constitué par les écrans, les chevilles croisées sur son bureau, elle porta sa main à son visage pour se pincer l'arète du nez entre le pouce et l'index. C'est après une demi-douzaine de bulles et quinze minutes de réflexion qu'elle reprit son infochron, remplit les formulaires basiques de recrutement et les envoya au centre de rediffusion à Thayd. Juste avant d'envoyer un dernier message.

-" Argiess a réussi à sucrer le personnel à Emerson. Je prends les paris. Interdiction de lui dire, il doit trouver tout seul."



~



-" Voyons, voyons, voyons... Oh !"

Dans son bureau à bord du Quitte ou Double, Madeline Malone, récemment chargée des communications de sa branche, esquissait un sourire en tombant sur une copie du message que Lucius Emerson avait reçu de la part de SamLi' TV. Elle se passa un doigt songeur sur les lèvres alors que son sourire s'étirait.

-" Vous avez refusé, et maintenant vous partez en expédition... Allons, professeur, nous savons tous ici à quel point vous aimez être sous les projecteurs. Surtout après le coup de la cérémonie filmée."

Reprenant son infochron en main, elle composa les coordonnées du centre d'appel de la chaîne.

-" Et je suis certaine que la ravissante mademoiselle Shelley et votre grand ami Yänsson seront ravis, eux. Ils ne sont pas si bornés."

Tournant la tête sur le côté, elle s'aperçut que Cyrus dormait. Il lui faudrait attendre le matin pour lui annoncer la nouvelle.




~



Lucius était blême.
De l'autre côté d'une porte gardée par deux granoks, dans le vaisseau-hôpital de l'ASX, il était assis en tailleur sur le sol, le visage entre les mains. Parvenir jusque-là avait été une gageure, et il comptait mentalement les secondes qui le séparaient encore d'Eva entre deux menaces de mort adressées en silence à sa parentèle cassienne. Les secondes qui le séparaient encore de sa femme. Le soir de son mariage. Blessée. Shelley. Shelley qui était encore sortie travailler seule. Alors qu'il aurait dû être là. Il n'aurait pas dû dormir.

-" Quatorze mille sept cent cinquante-quatre... Quatorze mille sept cent cinquante-et-un ... Quatorze mille sept cent quarante-six... Quatorze mille sept cent quarante... Quatorze mille sept cent trente-huit... Quatorze mille sept cent trente-quatre... Quatorze mille sept cent trente... Quatorze mille sept cent vingt-sept..."

Il finit par sortir son infochron de sa poche et consulta ses derniers messages dans une vague tentative de tromper l'inquiétude qui le rongeait.

Aucune réponse aux annonces concernant l'équipe de l'expédition... Invictus introuvable... SamLi' TV en couverture de l'expédition...

SamLi' TV en couverture de l'expédition ?

Il se redressa d'un bond, se cognant la tête contre le rebord du mur derrière lui. Le rugissement de douleur et de fureur mêlées qui lui échappa fit grincer les granoks qui le supportaient depuis une demi-heure.

-" C'EST UNE CONSPIRATION ?!"

Après un regard à son comparse, le granok le plus proche de Lucius fit preuve de compassion.

-"Plus belle soirée de ma vie mon..." pensa Lucius, juste au moment où un poing massif s'abattait sur sa tête et le plongeait dans une miséricordieuse inconscience.

Il était tard. Ou tôt, selon le point de vue. Du point de vue de Lucius, il était tard. Très tard. La visite du complexe s'était merveilleusement bien déroulée, pour peu que l'on oublie la présence de ces jeunes femmes prêtes à tout pour filmer du sensationnel qui leur avaient collé au train toute la soirée, et l'intervention de Waltz à la fin de l'émission.
Un seul blessé léger - Callaghan -, des données récoltées à partir de l'Annihilateur... Et ce câble.

Assis en tailleur, Lucius promena son regard gris alentour. Les premiers rayons du soleil auréolaient la crète des montagnes d'explosions de lumière dorée, et le bleu du ciel s'en trouvait encore embelli. Il sourit, dans l'air frais et sec du canyon, avant d'examiner les personnes déjà levées. Les quelques ouvriers qu'il avait pu réunir étaient arrivés - il les entendait discuter, en haut de la falaise - et Deltred se tenait un peu à l'écart, les yeux tournés vers le complexe lorsqu'il n'était pas en train de frotter consciencieusement ses blasters.

Le professeur glissa ses doigts dans son épaisse barbe pour se frotter le menton, songeur, avant de reprendre le travail d'écriture soigné qu'il accomplissait depuis qu'il était levé.
C'est une heure plus tard qu'il déplia sa longue carcasse et s'étira, avant de prendre la direction des plateformes ascensionnelles.
-" J'ai une course à faire," dit-il au mercenaire qui montait encore la garde, déjà trop loin pour qu'on lui pose des questions. Dans son poing serré, un marqueur noir.

~

Eva observait le camp Viridien qui s'étalait sous ses yeux, à l'abri des arbres. Elle ne manquait pas le moindre détail, et, une main curieuse éprouvant la texture de la crinière de l'equivar de son époux, elle suivait du regard un léger scintillement dans l'air qui se déplaçait au beau milieu des installations. De temps à autre, le rabat d'une tente se soulevait, pour retomber quelques secondes plus tard. Au bout d'un moment, le manège cessa. L'homme qui se baladait équipé de sa peau nano était apparemment entré dans l'une d'elles.
Quelques minutes plus tard, Emerson apparaissait à l'entrée du camp.
- " WALTZ !"

Une certaine agitation s'empara des tentes et, après quelques minutes, Eva put enfin aperçevoir l'homme qui avait pris Lucius à parti la veille et s'avançait pour l'accueillir. Ses traits étaient masqués par une écriture en lettres capitales, noires, s'étalant sur son front, ses joues et son menton.
Le plaisantin était parvenu à caler l'entière phrase. "Le docteur Eva Shelley-Emerson n'est pas une assistante".

Lorsque le professeur Waltz arriva au niveau d'un Lucius débonnaire et lui tendit la main, c'est un poing expert qui vint s'écraser sur son nez avec nonchalance. L'explication de Lucius, simple, concise et humble comme à son habitude, fit écho au "crac" produit par le contact de deux corps dotés d'intelligence.
-" N'insultez plus jamais ma femme."
Lucius essuya paisiblement le revers de son gant sur son manteau, puis, après avoir souhaité une bonne journée à toute l'équipe, tourna les talons pour retrouver sa monture.
Il ne parut ni surpris, ni ennuyé de trouver ladite femme juchée sur sa selle.

-" Voilà longtemps que je n'avais pas eu à mettre mes poings sur les "i"," fit-il en souriant avant de grimper derrière elle et s'en retourner vers Algoroc avec la satisfaction du travail bien fait.

« Non... Non, je ... Monsieur... Monsieur... Professeur, je vous en prie, ne tenez pas la tronçonneuse ainsi ! Plus bas ! Plus bas ! Il faut qu'on la voie ! Et faites saillir vos avant-bras ! »
Alise Lane, assistante, courait sur le plateau. Elle manqua de se prendre les pieds dans les fils d'alimentation des lampes "NaturePlus" en se précipitant vers un homme en polo et en tablier - et bottes en caoutchouc AntiPesanteur (avec lesquelles vous ne vous enfoncerez plus jamais dans les sables mouvants ! Disponibles en vert, bleu, rose et jaune à pois oranges pour les plus audacieux !) qui maniait le dernier modèle de tronçonneuse bradée par Protostar. C'était peine perdue.
L'homme portait également le casque antibruit (seulement quarante crédits !) et avait de toutes façons passé la matinée à ignorer la totalité des instructions qu'on lui donnait. Alors qu'elle s'approchait prudemment en faisant de grands gestes pour se faire remarquer, Alise maudit le service de communication qui avait eu l'idée folle de faire appel à l'ASX pour promouvoir leur nouvelle gamme de produits utilitaires. Et maudit dans la foulée l'ASX pour leur avoir envoyé l'équipe T-42.

Ils avaient commencé avant même que le jour soit levé : il fallait d'abord tout installer pour être sûr de capter toutes les nuances des lumières de la journée en Célestion. L'équipe avait bien travaillé, et tout semblait destiné à bien se passer. Puis Orioch Yänsson et Lucius Emerson étaient arrivés.
On avait affecté Orioch au rayon bricolage et Lucius au rayon jardin.
Ils avaient fière allure. Vraiment. La patronne d'Alise était restée bouche bée, l'index contre la branche de ses lunettes, passant mentalement en revue toutes les possibilités de tenues et de positions qu'elle pouvait tirer de ces deux-là. Lucius s'était laissé glisser à bas de son velocirex qui dérapait dans les plantes grasses tandis qu'Orioch, lui retirait déjà son casque : sur son broyeur, il était arrivé avant.
Un "PREMIER. C'EST PAS MOI QUI FAIS LA VAISSELLE !" retentit avec autant de force qu'une corne de brume alors que Lucius ouvrait et fermait la bouche, coupé dans son élan de protestation. Et puis il agita la main en secouant la tête : "non, non, je suis désolé, il n'y a pas de "premier" qui tienne, tu as fait exprès de prendre le chemin qui est complètement barré par un tronc de sept mètres de haut." Orioch gloussa. Son gloussement ressemblait à un bruit de radiateur rouillé ou de moto pétaradante, un "krr krr krr" plein de satisfaction. "Je t'avais dit que mon broyeur était plus performant que ta bête. Tu n'avais qu'à choisir quelque chose qui peut effectivement bondir sept mètres plus haut."
Ils continuèrent de débattre de la validité des résultats en ignorant tout à fait le personnel qui se demandait à quel moment intervenir, se dirigeant vers les tables où les produits étiquetés étaient alignés. S'il leur était impossible d'être d'accord sur l'issue de leur pari, ils ne firent plus qu'un lorsqu'il s'agit de commenter l'équipement :
« C'est de la merde, » déclara nonchalamment Orioch en donnant une pichenette à une foreuse pour faire résonner le revêtement métallique. « Ça va sauter dès qu'on va atteindre quelque chose d'un peu plus dur que du schiste. »
Lucius soulevait une paire de sécateurs et les faisait jouer près du visage d'Orioch : « non mais qu'est-ce que tu veux couper avec ça... C'est... »

Quelques pas derrière, l'ensemble de l'équipe était en train de blêmir. La petite Alise, fascinée, avait sorti son appareil photo pour immortaliser ce moment et publier la mésaventure sur son blog.
Et pendant ce temps là, Lucius un menaçant faisait claquer ses cisailles sous le nez d'Orioch avec une grimace tandis que son ami ripostait en faisant mine d'actionner la foreuse dans sa direction avec des "en garde !" emphatiques et des "haha !" triomphants.
Il fallut un long moment pour mettre de l'ordre sur les plateaux et pour convaincre les deux chercheurs de coopérer. Ils n'étaient pas en soi difficiles à diriger, prétendait Lucius, qui ajoutait qu'il était d'une égalité d'humeur rare et tout disposé à se plier aux indications des professionnels. MAIS ! reprenait-il de sa voix de stentor pour courir l'hilarité d'Orioch et sans tenir compte des mines atterrées des gens autour, l'index levé, s'ils devaient faire la promotion de produits et donner l'impression qu'il s'agissait de bons produits, il fallait, effectivement, de bons produits !
Alise finit par réussir à les entraîner plus loin pour leur faire passer les vêtements qu'on avait choisi pour eux et les convaincre de "faire semblant." Elle avait la même patience qu'une mère qui décide de faire le vaisseau spatial avec sa cuillère pour faire avaler de la bouillie à un bambin récalcitrant.
Quand elle finit par coller dans les bras des deux scientifiques les premiers objets à photographier, il était midi.
Ils n'étaient pas au bout de leurs peines.

Orioch réorganisa entièrement l'établi (modèle de base à vendre, supplément pour l'équipement) arguant que c'était "esthétique mais pas pratique, bon sang, un atelier est fait pour être pratique ! On ne met pas les vis à un bout et la visseuse à un autre, ça n'a pas de sens !" et Lucius refusa catégoriquement d'empoigner la tronçonneuse tant qu'on n'aurait pas trouvé un autre bosquet : celui-ci ne comptait que des arbres à protéger. Quelqu'un posa timidement la question du "pourquoi étaient-ils à protéger," un petit jeune qui n'avait aucune idée de ce dans quoi il se lançait. Cette nuit là, il rêva d'essences d'arbres qui venaient le dévorer. L'un d'entre eux était un arbre géant pourvu d'une épaisse et longue barbe noire et curieusement moulé dans une chemise bleu outremer.

L'équipe apprit beaucoup de choses ce jour-là. La vie réelle et le sens pratique, hélas, étaient difficilement photographiables pour un catalogue de promotion. Orioch n'avait plus l'air de rien, harnaché d'un tablier anti-chaleur et d'un masque qui lui mangeait le visage et lui grossissait les yeux, penché, voûté, rapetissé derrière l'établi tandis qu'il montrait comment utiliser correctement la soudeuse.
Lucius refusait de tenir les instruments dans des positions "gracieuses" et "attrayantes" - "On doit avoir l'impression que la cisaille est l'extension de votre bras, monsieur Emerson, vous devez convaincre que c'est l'outil le plus confortable sur le marché !"  "Mais quoi, comment, comment voulez-vous que ce soit confortable alors que je ne porte pas de gants ? Vous imaginez le nombre d'ampoules que vous avez à la fin de la journée si vous oubliez de mettre des gants ? Et je ne vous parle pas des piqûres d'insectes, des risques d'irritation dûs aux plantes, et de..." - et avait une tendance marquée à tourner le dos à la caméra.
L'éclairagiste jouait dans un coin avec un ressort, assis sur une souche, le regard vide. Les opérateurs s'étaient lancés dans une partie de saut à l'élastique. La patronne d'Alise biberonnait un margarita instantané, enfoncée dans son fauteuil "spécial urgence," l'oeil rond. Une mèche de cheveux normalement impeccablement lissée frisait hystériquement contre sa tempe. De temps en temps, elle lâchait un petit éclat de rire suraigu et tremblant.

~

Installé dans son fauteuil, Lucius contemplait d'un air ravi le catalogue holographique dont on lui avait envoyé un exemplaire. Il souriait joyeusement.
« Hé, Yänsson ! »
« Mh ? »
Le son provenait d'un endroit proche de la cuisine. Lucius se leva et se mit à la recherche de son compagnon. Il était en train de se savonner les cheveux. Avec une royale indifférence, Lucius entra et lui montra les images. Un petit canard en plastique jaune voguait sur des montagnes de mousse dans le baquet de bois qui portait le titre de baignoire.
« Regarde ça ! »
« Ahah, génial ! » s'exclama Orioch en apercevant les photographies. Il se mit à rire sans plus pouvoir s'arrêter après avoir passé la troisième page. On avait employé les images prises peu après leur arrivée, et de petites étiquettes clignotantes avaient été ajoutées aux objets qu'Orioch et Lucius agitaient sous le nez l'un de l'autre. On les voyait ainsi lever les bras, marcher, rugir ou rire, se menacer, comploter, désespérer. Et sans les exclamations outrées qu'ils poussaient pour déprécier la qualité des outils, il fallait reconnaître qu'ils avaient l'air de passer un bon moment.
Lucius se passa la main sur le menton, blasé.
« C'était bien la peine de nous tancer toute la journée si c'était pour se contenter de ça. Je te jure, les artistes, ce sont tous les mêmes : ils ne savent pas ce qu'ils veulent. »
Un "sluuuuurp" pensif lui répondit. Orioch leva les yeux sur Lucius après un moment, une paille coincée entre les dents, un thermos de café décoré d'une pin-up à la main. Voyant que Lucius attendait quelque chose, il lâcha un "ho, oui oui" convaincant en hochant la tête. Puis, voyant que Lucius ne manifestait aucune intention de bouger, il ajouta :
« Je peux terminer de me laver peinard, maintenant ? »



En bas, en blanc sur fond vert, les mots "Alise Lane" s'étalaient en tous petits caractères scintillants.